L’idée de ce texte a germée à Montréal, dans le jardin de la demeure de mes amis Karl Parent et Louise Vandelac habitant les rives de la Rivière des Prairies, alors que je préparais avec cette dernière mon intervention à un colloque que nous organisions à l’Université du Québec à Montréal sur les enjeux anthropologiques du transhumanisme. J’appelais la partie du cours d’eau qu’il m’était donné de contempler depuis ma chambre le « lac » car cette dernière était clairement découpée par des arbres qui ne laissaient entrevoir qu’une portion, ce qui ne manquait pas d’amuser mes hôtes. L’humanité est ainsi faite que nous n’en percevons toujours qu’une partie, la communauté des vivants, laissant dans l’oubli, en aval, les morts et en amont, ceux qui ne sont pas encore advenus. Les êtres du passé sont pourtant ceux qui nous ont engendrés et qui, au cours d’un long processus nommé Évolution, nous ont permis d’être ce que nous sommes, en nous léguant la culture. Notre descendance, que nous nommons « les générations futures », avec une pointe d’inquiétude fort légitime, ne semble plus appartenir à une « communauté de destin » telles que pouvaient encore les figurer les dernières formes d’humanisme religieux ou progressiste, alors même que la survie de l’espèce est engagée comme nous allons le voir.